Oui, bon, la chambre est rose. Je ne suis pas du genre à trop me plaindre pour rien, ce genre de détails restent des détails. Je ne suis pas fan du rose, certes. Mais pour voir le bon côté des choses, on sera vite reconnaissables aux yeux du public. « Les Waratah ? Ah ouais, la chambre rose ! » Marquer les esprits, c’est pas si mal. Positivons. Mince, voilà que je me mets à penser comme un chef d’équipe. Je ne suis pas certain que ce soit un job fait pour moi. Mais c’est un chouilla trop tard pour se désister. Dans mon programme de jeu, je n’avais pas prévu d’avoir à être celui sur qui on compte pour faire tenir le cap à l’équipe. J’étais plutôt dans l’optique où j’allais me battre pour ma gueule, ou pour mon binôme. La vie est injuste. Je l’ai bien cherché. Allez, vive le rose ; j’entre dans la chambre avec l’idée de me poser sur mon lit et… faire la sieste, ouais. C’est pas le pire programme qui soit. Je dois aussi me mettre à la recherche de mon binome. Mais pour le moment, je ne me vois avec personne ici. J’me demande sur quoi je vais tomber. Du prime d’ouverture, j’avais repéré Lizzie ; forte tête, un caractère bien trempé, c’est en général ce qui me plait. Les nunuches me gavent. Mais ma partenaire (ou mon partenaire, sinon ça serait pas drôle) se trouve dans une autre équipe. Quelle galère. La flemme. Où est mon lit ? Lorsque j’entre, c’est cette chère Lizzie qui m’accueille avec un salut militaire. Je reste surpris un instant, sans trop comprendre ce qui lui prenait, avant de capter. Chef. Nom d’un chien. Finalement, je lui souris. « C’est à toi que je dois ce merveilleux titre. Par contre, je suis censé te remercier ? » J’approche de mon lit, et m’assied dessus. Chic, juste à côté du sien. Chic, c’est rose. « La chambre te plait ? » fais-je avec un sourire amusé. « J’suis sûr que Clev’ est fan de la couleur. »

J'pense qu'avant la fin du jeu, j'allais repeindre ces murs en... Noir. En noir, c'est cool le noir. Ou alors avec plein de rayures de toutes les couleurs. Ou alors j'allais faire comme dans ma chambre, j'allais coller plein de photos sur les murs. Parce que le rose, sérieusement, c'est pas possible. La prod m'avait déjà assez fait chier comme ça, pourquoi en plus me coltiner une chambre barbie princesse raiponce ? Même gamine, j'aimais pas le rose. Ma mère ou ma nounou me gueulaient tout le temps dessus parce que je plongeais mes petits poneys dans l'encre noire. Wesh un poney gothique, ça avait tout de suite plus le swag... Puis je prenais les boucles d'oreille en or pour les foutre dans le plastique aussi, histoire de faire des piercings... Oh et la crise le jour où j'ai du porter une robe rose pour aller au baptême de mon cousin ou j'sais pas quoi... J'me suis pris une de ces baffes quand ma mère a vu que je m'étais changée au dernier moment pour mettre sa robe en cuir trois fois trop grande pour moi... bref, le rose ça fait tarte et puis voilà. Ah oui, Gabriel était à côté de moi. « C’est à toi que je dois ce merveilleux titre. Par contre, je suis censé te remercier ? » Je levai une main. Ca se voyait qu'il était pas ravi-ravi d'être le chef de l'équipe. A sa place j'serai en mode dinde le jour de Thanksgiving, tu vois le truc ? Donc j'le comprenais. Mais c'était pas ma faute. « Nan, c'est la plouf qui a décidé, pas moi, nuance ! » Nan mais ho, j'étais pas responsable ! Puis t'façon lui ou un autre, ça changerait pas grand chose. « La chambre te plait ? » j’ouvris de grands yeux, faisant semblant de vomir. « Du rose, merci bien. Manque plus que de la dentelle en couvre lit. » dis-je en dissimulant un rire. « J’suis sûr que Clev’ est fan de la couleur. » Haaan le vilain ! C'est vrai que Cleveland, le papi comme je l'appelais, était un peu efféminé. Puis j'crois qu'il était transformiste. tiens fallait que je le harcèle pour qu'il me montre ses faux cils à lui, j'allais taper une bonne barre. Quoi, ils sont cool les trav ! Reprenant un daim, je déclarai, mine de rien. « Bah, c'est assorti à ses chihuahuas quoi ! » je haussai les épaules. C'était pas censé être méchant, mais des fois je l'étais sans m'en rendre compte, alors allez savoir.

Ah ouais, la plouf. Le hasard. Le destin. Je retiens. Le mec barbu planqué derrière les nuages, si j’le croise, j’le bouffe. J’le trouverai, j’le traquerai, et j’me vengerais. Il sait bien, pourtant, que je supporte trop peu l’autorité pour en être le représentant. C’est un coup bas. J’ai du lui faire quelque chose, il m’en veut. J’ai dû oublier d’aller à la messe le jour où il fallait pas. Merci bien. « T’as été l’instrument de la plouf. Et tu sais bien qu’on tue toujours le messager. » je lui dis avec un regard noir –pour rire, évidement- comme si je pourrais à n’importe quel moment lui sauter dessus pour la bouffer. Quoi qu’avec tous les daims et autres twixs qu’elle s’enfile, doit y avoir de quoi se mettre sous la dent. Oh non, je critique pas ; les pouffes anorexiques, c’est pas mon truc. Mais, faut être réaliste ; à ce train là, son arrière train sera si gros qu’on ne verra plus qu’elle dans l’émission tant elle prendra de la place. J’suis cruel. Quoi que, au pire, si le rose la fait gerber à chaque fois qu’elle entre dans la chambre, elle peut peut-être même sortir du jeu avec des kilos en moins. Ceci explique cela. « Ca me rassure, je comptais t’offrir une peluche Petit Poney pour te remercier de mon élection. » Ironique, comme d’habitude. Oh oui, elle adorerai, j’en suis certain. Et un poster géant de Dalida pour Clev, cadeau. Je me penche vers le paquet de daims que tient Lizzie et lui en pique un qui se retrouve immédiatement écrasé par mes quenottes. Sans rancune, hein. « Une équipe freaky dans une chambre rose, si ça ça nous fait pas gagner. » Entre la peste, la future baleine, le transformiste, la face de photoshop… C’est rock’n’roll j’vous dit. « Et donc là, je suppose que t’es en pleine réflexion intense au sujet de ton binome. » j’ajoute avec un sourire mutin. C’est évident ; et tous les daims, c’est de l’énergie pour tous ces petits neurones qui travaillent dur.

« Tu me file un petit poney et j'te bouffe. Ils me font peur. » dis-je en fronçant les sourcils. Nan mais le pire c'est que c'est vrai, ces bestioles m'inquiètent. Attends t'as déjà vu un cheval à paillettes violettes avec un putain d'arc en ciel tatoué sur la fesse ? Y'a un truc PAS NORMAL chez les petits poneys, c'est moi qui t'le dis ! Le petit poney je l'aurais décapité. Oh, et je l'aurais accroché au dessus du lit de princesse là, Alexis. Elle aurait kiffé j'pense... Ou elle m'aurait frappée à coup de tiare en strass 2€ pièce, j'sais pas, faut voir. Hééé mais eeeeh mes daims ! Bon, remarque... C'était peut être pas plus mal qu'il m'en pique, j'allais pas bouffer que ça ! J'prends pas des masses de kilos quand j'bouffe, ça doit venir du fait que j'suis habituée à mal bouffer depuis toujours, mais bon... A part la piscine ou courir dans la forêt, je risquais pas de faire beaucoup de sport ici... Alors j'voulais pas me transformer en Lizzie-le-gros-tas. Déjà qu'à côté des squelettators alias les autres filles de la maison, j'avais l'air massif... M'en fous, les rondeurs ça sert à réchauffer les coeurs ou j'sais pas quoi, comme dirait Amel Bent ! Je pouffai de rire. C'est vrai que notre équipe était weird... Déjà Gabriel en chef, voilà quoi. Moi ça me dérangeait pas qu'il soit arrogant mais j'pense qu'au bout d'un moment, des gens pourraient plus le piffrer. T'avais Cleve le trav aussi, un sacré numéro celui là. Mais il était cool. En fait, j'aimais bien mon équipe, j'avais une dent contre personne. Après si les gens me cherchaient, ça allait en cher, mais bon c'était que le premier jour, j'allais pas sortir la tronçonneuse tout de suite. Je haussai les épaules, reprenant un daim... Promis, demain j'arrête, et je posai le paquet sur le couvre lit -rose, comme c'est étonnant. « Oh putain, j'ai genre aucune idée de qui ça peut être. C'est chaud cacao. » alors que j'avalai mon DERNIER daim, je tournai les yeux vers Gabriel. « Et toi, t'as une idée ? »

Note à toi-même, je ne suis pas arrogant. Je suis un mec avec des opinions très arrêtées dans un langage franc. Je ne regarde pas les gens de haut, je suis juste de grande taille. Merci. En revanche, je ne suis pas comestible. Difficilement digérable. Je dis toujours que si je reste célibataire, ce n’est pas pour rien. Non seulement je défie la production d’avoir trouvé quelqu’un avec qui j’aurai des affinités, mais en plus je défie cette personne de me supporter plus de deux semaines –durée moyenne actuelle de mes relations amoureuses. Ca sera épique, je vous le dit. Je serais sûrement capable de faire un effort. Je sais être vivable aussi, c’est vrai. Promis. Mais en attendant, je devrais déjà le trouver. Voir même, songer à penser à commencer à établir un plan de recherches. Après, on verra. « Pas vraiment. » je lui réponds. Je fais mine d’être le chef d’équipe un peu plus sérieux que je ne le suis vraiment, et qui cherche son binome pour de vrai. Histoire de. Je sais que Clev a déjà trouvé le sien. Voilà, j’aurai dû laisser l’antiquité être chef aussi. C’aurai été parfait. « Je pense qu’on aurai été cools en binôme, nous deux. T’es pas une nunuche, j’aime bien. » J’hausse les épaules ; ouais, mais le binome n’est pas dans l’équipe. Tant pis.

Mon binôme, il allait en chier, ça c'était clair. Je l'ai dit d'emblée au casting : l'amour, j'en avais tellement rien à battre... Presque autant que ma première Barbie à qui j'avais rasé le crâne, t'vois le genre. Des mecs et des meufs, y'en a partout, et pour venir ici juste pour s'trouver un keum, faut être désespéré. En plus, j'avais déjà essayé de deviner mon binôme, j'avais proposé Lewis, le type qui parlait jamais, toujours dans ses bouquins... C'est c'que j'avais demandé à la prod, une carpette qui me laisse tranquille et qui chercherait pas à faire son jaloux. Mais nan. J'allais me retrouver avec un cassos... « Si j'me retrouve avec une aussi grande gueule que moi, ça va chier des bulles vite fait. » J'veux une face de flan wesh ! Un type à mes pieds, qui pourquoi pas, me filerait sa cagnotte. Mais nan la prod allait m'casser les burnes jusqu'au bout fallait croire. J'me suis affalée sur le lit, dos au mur, le regardant en souriant. La tentation de reprendre des daims était forte, naan Lizzie, résiiiiste ! Je souris à Gabriel. l'était cool, lui. « Et toi t'as l'air d'être un casse couille doublé d'une grande gueule. J'aime bien. » On s'ressemblait un peu, en fait. Sauf que moi j'faisais genre j'suis pas méchante, lui il avait pas l'air de se cacher.

Les paroles de Lizzie me font rire ; visiblement, elle comme moi n’avions pas vraiment foi en des inconnus de la production pour trouver quelqu’un qui nous conviendrait. « J’ai hâte de découvrir ton partenaire alors ! » je fais avec un rire. Oh, qui sait, peut-être feront-ils un miracle. Mais j’en doute. J’ai le paradoxe de m’attacher rapidement aux gens, car je ne suis pas un difficile au niveau physique, et que j’aime me dire que tout le monde peut être intéressant à découvrir. D’un autre côté, sans grands critères pour me plaire, j’ai une liste d’un tas de petits détails qui me rendent difficile à contenter. Un chieur, en somme. Autant le dire. Mais je pense sincèrement que Lizzie et moi, d’après l’impression qu’elle m’a fait le soir du premier prime, nous aurions formé une bonne équipe. Quoi qu’en y pensant ; nous sommes déjà une équipe ! Et pour le moment, faute d’être la seule à qui j’ai réellement parlé sans l’envoyer paitre dans la team, elle est la seule qui me semble facilement supportable. En y repensant, je devrais leur taper la causette un à un, histoire de me rattraper du prime. Je suis parfois trop je m’en foutiste pour mon propre bien. « Je suis le mec le plus sympa que t’ai jamais connu. C’est juste que tu ne le sais pas encore. » je lui réponds avec un clin d’œil. Je pense qu’après tout, si je n’étais qu’un casse-couilles insupportable, on ne me mettrait pas à la radio pour réveiller les auditeurs.

Je haussai les épaules, lorgnant sur le paquet de daim. « Du moment que c'est ni un coincé, ni une espèce de pervers de mes deux, ça passe crème. » En tout cas, je pensais vraiment que j'allais privilégier l'équipe à mon binôme quel qu'il ou elle soit... Parce que j'aurais plus de représailles si je laissais tomber l'équipe. Puis Gabriel était pour l'instant le seul avec qui j'avais sympathisé dans la maison... Même si je doutais pas que les autres allaient bien m'aimer. J'étais un peu bizarre, mais tellement adorable, eh ouais. Je soufflai un rire à la remarque de Gabriel. Typiquement la réponse du mec qui se sait chiant et qui assume. « Mais moi je suis la fille la plus extraordinaire de la terre ! Même si j'avoue que j'pars dans des délires chelou des fois. » Ben, c'est vrai... D'ailleurs à cet instant précis, j'me demande c'que ça donne si on accouple une grenouille et un mammouth... J'aurais bien tenté l'expérience mais les mammouths, ça existait plus. Roh et puis merde, jésus, marie, joseph et le père castor, j'ai repris un daim. Je suis faaaaaaible ! Et tout d'un coup, illumination. « Eeeh, au fait, t'es pas un Angliche toi ? ca a rien à voir j'sais mais j'y ai pensé alors bon. »

« Tant mieux, tant mieux. » Les filles cheloues, c’est toujours plus sympa que les lauréates de l’académie des barbies –non merci. Pour ma part, mon job consiste à dire des aneries, tourner en dérision les infos, donner un peu de bonne humeur aux gens, droit dans leurs oreilles. Alors les délires étranges, je connais, ça me va. Au moins, je suis certain qu’avec Lizzie dans l’équipe, on ne risque pas de s’ennuyer. Elle reprend un daim, ça me fait sourire, amusé. Allez, j’me penche aussi pour en chiper un. C’est que c’est bon, ces merdes. Je comprends qu’elle s’en empiffre. Alors que je gobe le bout de caramel et de chocolat, Lizzie s’exclame que je suis Anglais. Oui, ça avait été dit dans ma présentation, rien de nouveau. Néanmoins, je pouffe de rire, surpris. « Pas du tout. Moi je suis un envahisseur venu de la planète Zeurg, j’ai deux doigts par main et un œil au milieu du front. » Normal. Plus sérieusement, je reprends. « Non, j’suis Anglais, c’est bien ça. Le mec à l’accent snob. Même que je ne rate jamais l’heure du thé. » Sans rire, vraiment, je suis pote avec les sachets de Lipton. Mais c’est secret.

« Naaaan ? » dis-je avec un grand sourire. heureusement que j'avais plus de daim dans la bouche, bonjour la honte. Devant Gabriel, je m'en battais les couilles, mais devant les caméras, ça le faisait moyen... Ma mère regardait l'émission quand même. « Enchantée, je viens de la planète Xenon, j'crois on est voisins ou un truc du style. » dis-je, éclatant de rire. Bref, reprenons notre sérieux. « Ma mère est anglaise à la base. Donc j'ai aussi une passion pour le thé. Bienv'nue au club des théières ! » dis-je, cette fois sans reprendre un daim. Ouais je savais me contrôler, des fois ! Des fois.

Si, si, je vous assure, je suis un Alien. Enfin, c’est ce que semble dire mon sourire, qui répond à l’émerveillement de Lizzie, avant de se transformer en rire. Elle joue même le jeu en disant venir d’une autre planète elle aussi. A la limite, je serais presque enclin à la croire, tant ça ne m’étonnerai pas. « Peut-être même cousins, qui sait. Mais ça me fait plaisir qu’avoir un compère de l’espace ici ! » Ca y est, je passe aussi pour un dingue. En plus de passer pour un chieur. Une grande gueule. Et un Anglais. La totale ; avec ça, c’est clair que le public va m’aimer, tiens. Surtout à l’heure du thé. Je suis assez curieux lorsque Lizzie me dit que sa mère est Anglaise. Patriote que je suis, je dirais même que ça me ravit. « Alors plus aucun doute ; deux aliens qui ont une culture du thé, c’est qu’on a forcément une sorte de lien de parenté. » Et si c’est le cas, je ne sais pas si je suis rassuré ou non d’avoir un spécimen comme Lizzie dans ma famille. Comment ça, c’était une plaisanterie ?

« J'te jure... En fait t'es mon demi cousin par alliance caché. J'suis sûre que c'est ça ton secret et que t'es venu me faire une surprise, aha ! » Bien sûr, je plaisantais, hein. Je l'aurais su si Gaby avait un lien de parenté avec moi... Quoique. Vu que je connaissais pas mon père, ça aurait pu être possible. Mais quoi qu'il en soit, je m’intéressait pas encore aux secrets des autres joueurs, encore moins à ceux de mon équipe. Quoique, j'aurais bien aimé découvrir celui de Beau, rien que pour qu'il ferme sa grande gueule, mais bon. J'me concentrais sur mon binôme, c'était déjà bien, faut pas trop m'en demander. « Mais le thé ceylavie, t'as vu cousin. » Je nous voyait bien boire notre thé dans la cuisine pendant que les autres étaient en mode "pas compris"... Quoique, Mercy aussi elle était anglaise j'crois. Ben oui, quand j'ai mené l'enquête pour trouver mon binôme, j'ai essayé d'en savoir plus sur tout le monde, normal. D'ailleurs, y'avait des gens, que déjà, j'aimais pas. C'est dans les gênes, ils m'avaient même pas parlé mais leur gueule me revenait pas, c'était comme ça. Genre une blonde Ocycy ou j'sais pas quoi. Ou l'autre Beau là. Enfin bon, j'étais gentille alors j'allais faire ma gentille. Mais si ils me cherchaient, ils allaient voir pourquoi j'me fais appeler tronçogirl. « Sinon, ton opinion sur les autres ? » C'était quand même le chef de mon équipe, il devait avoir parlé avec plus de gens que moi.. Ou pas.

J’ai déjà dit que j’aime bien Lizzie, oui ? Bon, ça se confirme. Je croise pas tous les jours des aliens buveurs de thé, et ça me plait assez. Mais ça se voit sûrement ; quand quelqu’un me déplait, je le fais savoir, on l’a déjà remarqué. Je suis pas méchant non plus, pas si agressif que ça, je ne mords pas quoi. Je suis tout à fait capable de dire qu’un mec me fait chier sans lui foutre une baigne. Oui, je suis un chieur. Mais un chieur zen. Ce qui me rend sûrement encore moins supportable, parce que même quand on me tape sur les nerfs, je m’en fous. Parce que les crétins valent pas la peine qu’on s’explose les phalanges sur leur tête, nos doigts méritent mieux que ça. Mais je n’en suis pas encore à avoir d’ors et déjà des envies de meurtre sur qui que ce soit. Alors quand Lizzie me demande mon avis sur le reste de l’équipe, j’hausse les épaules. « J’ai pas tellement fait connaissance. Disons que j’suis pas parti sur les meilleures bases avec tout le monde. » Ouais, c’est ce que ça donne de faire son malin, Gabe. Mais t’apprendras jamais. « Mais en somme, Clev’ a l’air supportable, Haley-face-de-photoshop un peu moins. Noraline est mignonne, Abbie doit être cool. Alexis, sans avis fixe. » Mon regard se pose sur Lizzie, la moue dubitative. « Et toi… » La bouffeuse de daims… « Je sais pas ce qu’on va faire de toi. » je dis pour plaisanter. Non parce que, je l’aime bien, Lizzie. Ah, je l’ai déjà dit ?

Je ne pus m'empêcher de laisser échapper un rire. « C'est pas faux. » fallait dire que Gabe avait fait son chieur dès le début, mais dès le début je l'avais bien aimé. Peut être parce qu'il avait dit qu'il voulait voter pour moi en tant que chef, peut être aussi parce que c'était le seul mec pas trop vieux de l'équipe, j'sais pas. « Mais faut bien que tu t'entendes avec les gens, surtout que t'es l'Waratah furhër maintenant. » Gaby en chef, ça risquait d'être pimenté, pour sûr. M'enfin bon, qui vivra verra. « J'aime bien Clev. Haley a l'air d'être un mec bien mais je l'ai pas trop cerné. Sinon les trois filles... Disons qu'Alexis me dit rien qui vaille. les deux autres, c'est ok. » répondis-je en haussant les épaules. Alexis avait des manières que j'aimais pas, mais j'allais pas m'arrêter à ça, elle était peut être super comme fille. Pour autant que je sache, elle pouvait tout aussi bien être un lama à huit pattes. « Nan mais moi j'suis un cas désespéré t'sais. » dis-je en reprenant un daim, normaaaal. « Un peu comme toi. » dis-je d'un air innocent.

L’Waratah Fürer ?! J’explose de rire. Et je note dans un coin cette expression qui détonne. Ca me fait pas forcément une bonne pub, mais je trouve ça pas mal, c’est amusant. Je suis pas du genre petit nerveux à la Hitler, mais je me vois plutôt bien en dictateur. Je ris trop, j’ai mal aux côtes, c’est grave. Il me faut un petit moment pour m’en remettre. J’ai sûrement l’air plutôt con. Mais… Ouais, non, j’suis un crétin. Quand finalement je cesse de rire, Lizzie me donne à son tour son avis sur l’équipe. On s’accorde plutôt bien les violons sur chacun d’entre eux. Après, je me demande quand même ce que eux peuvent penser de nous. Pour ma part, on m’a sûrement pris pour une forte tête ; tant mieux, peut-être que ça les incitera à pas trop me casser les pieds pour les choix en équipe. Tandis que je plaisante sur le cas de Lizzie, elle me renvoie habilement ma taquinerie. Je fais mine de lui lancer un regard noir –ce qui est pas bien difficile puisque j’ai les yeux noirs, de base, ouais. Finalement, cette moue ne dure pas ; je lui souris en déclarant ; « Nous voilà avec un nouveau point commun ! » Au fond, ça me fait plaisir de m’entendre aussi bien avec au moins un membre de l’équipe. J’attrape un daim au passage ; ça aussi, on l’a en commun, au fait. « J’pense t’embaucher comme bras droit du Waratah Fürer. J’te paye en daims, ça te va ? » Après tout, qui refuserai une offre pareille ?

J'me demande tout à coup si mon équipe m'aime bien. J'veux dire... Je suis pas spécialement une fille méchante, et j'espérais ne pas m'être faite passer pour telle. Une mauvaise première impression, c'est toujours chaud cacao pour la rattraper... Je sais de quoi je parle. J'fais souvent mauvaise impression. C'est pas ma faute si je dis tout ce que je pense, si ? Une fois, y'avait une pote de ma mère qui mangeait chez moi, une productirce connue ou un truc du style qui claquait bien dans l'genre. Elle avait un de ces chapeaux sa mère... Violent. On aurait dit un mix entre un vautour et une moufette empaillée. Et y'avait des faux fruits. DES FAUX FRUITS. Wesh, tu voulais que je dise quoi ? je lui ai demandé pourquoi elle avait cambriolé une décharge pour faire sa coiffure... Ma mère l'a pas super bien pris, et l'autre meuf non plus, parce qu'après on aurait dit qu'elle avait mangé son propre chapeau pendant tout le repas. Mais non non, il était encore sur sa tête.... J'étais morte de rire pendant tout le long. J'ai plus jamais entendu parler de cette meuf, ma mère non plus d'ailleurs. Roh au pire ça sera pas la première fois que je lui ai fait rater un contrat. Pauvre maman. Bref, il me parlait pas déjà, Gabriel ? Ah ben si. « On est jumeaux, mec. » dis-je avec un grand sourire. « J'serai trop forte en bras droit. Par contre, paye moi en salade... » je dis en observant mon ventre. « Parce là j'vais avoir l'impression que tu veux m'engraisser pour mieux me bouffer comme dans Hansen et Gretel. »

« Sans aucun doute. Séparés à la naissance, un truc comme ça. » Du genre Dallas, les Feux de l’Amour, ou Amour Gloire et Beauté. Voyez. Non, mais non, je vous jure que je regarde pas ces conneries. C’est juste légendaire. « Lequel d’entre nous est le jumeau maléfique ? » Ca aussi, c’est légendaire. J’en ris un peu ; c’est plutôt de la science-fiction, au fond. Avec cette histoire de bras droit du dictateur que je suis censé être, c’est même carrément du grand n’importe quoi. Et voilà même que Lizzie refuse un paiement en daim au profit de salade ! Mais où va le monde ? « Vraiment ? » Elle pense que je l’engraisse pour la manger. J’y réfléchis une seconde ; bouffer Lizzie ? Ca dépend dans quel sens du terme. « Je suis pas du genre à engraisser les personnes que je veux me faire au dîner. » je réponds avec une ambiguité volontaire. Pour rire, hein. Lizzie c’est comme ma jumelle alien, on dirait, t’vois.

« Je peux être le jumeau maléfique ? oh steuplait steuplait ! » Je me suis toujours bien vue en méchante de dessin animé. Mon préféré c'était Mojojojo dans les Super nanas. Ouais je kiffe les super nanas, et alors ? Ca gère tout. Ma préférée c'était Rebelle, les deux autres elles puaient, mais bref Mojojojo c'était un singe avec un casque chelou avec un cerveau dedans il gérait tout, je me voyait bien avec le même truc sur ma tête, quand j'étais petite j'en avais même fait un en carton, sérieux.. Ouais j'avais toujours été un peu dérangée. Puis j'éclatais de rire. Pourtant il aurait fait une super sorcière. « J'suis déjà assez grosse comme ça. » lui répondis-je en haussant les sourcils, un sourire sur la visage. « J'veux pas être la grosse vache de la maison. » puis je reportai mon attention sur mon coéquipier de la mort poulpe de l'espace intergalactique, tu peux pas test. « Par contre toi t'es un peu maigrelet. Faut manger sa soupe hein ! » le pire c'est qu'en disant ça, j'ai pris une voix de mamie, parfaitement.

« Si tu veux, tiens. Ca va me changer. » Je cédais le titre de jumeau maléfique à Lizzie à sa demande. Ca me fera pas de mal de passer pour le plus gentil des deux. Pour une fois que j’aurai le titre du bon garçon. D’ailleurs, je l’applique immédiatement ; d’abord en lui cédant d’être le jumeau le plus cool, mais aussi en faisant d’elle mon bras droit et en acceptant de la payer en laitue. C’est vrai que ça va lui éviter des kilos en trop. Mais personnellement, je ne la trouve pas grosse du tout. Mais alors pas du tout. Pourtant elle a peut d’être une grosse vache. « Bah, t’inquiètes. Si j’te nourris avec de la salade, tu deviendras plutôt « Lizzie la tortue » de la maison. » Et là j’imagine une tortue à tête de Lizzie grignotant une feuille de laitue. Oh putain. L’image part vite de ma tête lorsqu’elle dit qu’elle me trouve maigrelet. Non mais oh, je permets pas, ouais. « J’suis pas maigrelet. J’suis… pas épais, mais tout en muscles. » Et puisque c’est comme ça, je lui pique son paquet de daims et le garde fermement entre mes mains. J’vais m’en gaver, ça me fera prendre de l’épaisseur. Teuh.

« T'es si méchant que ça ? En tant que chef, tu dois me promettre que tu me fouettera pas si j'fais des conneries, hein. » Ben oui, même si il se montrait cool, peut être qu'en fait c'était un gros psychopathe qui allait tous nous tuer dans notre sommeil alors que nous ronflerons paisiblement dans cette chambre rouge-rose... Nan j'me fais pas du tout des films. Sérieux, il avait pas l'air comme ça, et même si il l'était, j'étais pas le genre de meuf à me laisser faire, mais alors pas du tout. C'est simple, on me frappe, je sors la tronçonneuse. Oui, j'suis comme ça. Sinon, bon, Lizzie la tortue... Ah non merci, je préfère encore être une vache. « Bon à la réflexion, j'reprendrais bien un daim. » dis-je en éclatant de rire. Hors de question de bouffer de la salade tout le temps t'façon. Une vie sans bouffe véritable est une vie pourrave. Après c'est que mon avis, hein. Je tendis donc la main vers le paquet de daims, le tout dernier de chez dernier, mais Gabriel me le vola. Han ! Mes daims ! Nanméhooo, je les avais volés en toute discrétion ! « Ah nooon, rends moi mes daims ! Tu me laisseras pas mourir de faim, n'est ce pas ? » dis-je en lui faisant les yeux du chat potté. ouais, j'étais toujours très forte pour faire les yeux du chat potté qui attendrissaient tout le monde. Je suis sûre que c'est grâce à cette technique que ma mère m'a toujours pas viré de la maison, mais chut, ça reste entre nous.

« Allons, t’en fais donc pas... » j’articule avec une voix doucereuse à la remarque de Lizzie sur le fait que je dois promettre de ne pas la martyriser. Je tapote son épaule, rassurant. « …T’y prendras vite goût, au fouet. » Pataper, je plaisante voyons. Non, j’suis pas si méchant. Même que j’ai décidé d’être un chef cool. Pas le meilleur, mais genre, potable. Avec qui y’a moyen de moyenner, voyez ? Et à moins que ce soit Clev qui me demande de lui en donner, je fais pas trop dans le coup de fouet. Je suis plus subtile et cruel dans mes punitions. Genre là, je pique le paquet de daims de Lizzie. Bouh, le vilain garçon. Pouvez pas test. Et elle pourra pleurnicher autant qu’elle veut, me faire ses grands yeux de chaton, y’aura rien à faire pour que je les lui rende. La vie est injuste, heiiiin ? « Allons, songe à tous ces kilos de salade qui t’attendent. C’est bien plus sain. » Je dis en fourrant le paquet sous mon oreiller, lui-même sous mes fesses, pour le rendre hors de portée. « Tu me remercieras. » Ca sera dur, mais elle se rendra compte que je lui rend service. Si elle m’a pas tué d’ici là.