Beau n’avait pas envie d’aller se coucher. En fait, il n’avait envie de rien. Ou de pas grand-chose. Alexis était partie et ça le saoulait vraiment. Lui, il restait. Pour une semaine ? Sûrement. Le prime était terminé, clôturé et surement que la majorité des candidats étaient partis se coucher. Après tout, ce n’est pas comme s’il y avait quelque chose à fêter. Beau, pour sa part, avait ramené une bouteille de tequila dans la bibliothèque, s’était posé sur l’un des fauteuils et il bouquinait. Non pas que la téquila soit indispensable, mais un verre en fin de chapitre n’a jamais tué personne. Ca se saurait. Content d’être là, blasé pour le reste. Putain, la semaine dernière avait été catastrophique. Beau avait dormit, rien d’autre à foutre de toute façon. Puis il avait décidé d’être encore plus bâtard que les semaines d’avant. Oh oui, quelqu’un comme Gabriel aurait sans doute changé son fusil d’épaule, histoire d’être encore plus faux-cul que d’habitude et d’être apprécié encore un peu plus, mais pas Beau. Oh non. On n’aimait pas sa personnalité, qu’ils aillent se faire foutre. Ouais, bonne mentalité. Bref. Bibliothèque, fauteuil, téquila, bouquin. La soirée n’était finalement pas si mal que cela.

Je ne me couchais jamais avant quatre heures. Pourtant, deux heures passées, j’étais au lit. Malheureusement pour moi, j’ai découvert qu’être au lit ne signifiait pas forcément dormir. Je dormais mal. Mal depuis que l’autre abruti était tombé malade, et que ce dernier avait eu la brillante idée de m’abandonner, moi et mes draps pour son lit. Sûrement plus confortable. Ou peut-être s’y trouvait-il mieux accompagné. Quoique, je ne veuille même pas connaître les raisons, j’en subissais déjà bien assez les conséquences. Je suis égoïste. J’en ai parfaitement conscience. Mais on ne me changera pas. Ainsi, après une bonne heure de lutte acharnée contre l’éveille, je bas en retraite. Tot ou tard, je trouverais le sommeil. Si ce n’est pas maintenant, se sera plus tard. Il s’agissait simplement trouver une occupation en attendant plus tard. Je m’habillai rapidement et grossièrement avant de faire le tour des villas. J’allais dans chaque pièce, une à une, à la recherche de ce je ne sais quoi, ou je ne sais qui, qui pourrait embellir ma soirée. Je le trouvai à la bibliothèque. Pas un livre. Un binôme. Beau, posé sur un fauteuil. Je remarquais le bouquin qu’il avait entre les mains, mais surtout la bouteille qu’il gardait à ses côtés. « Je commençais à me demander si tu étais toujours vivant… » La question se posait depuis la semaine dernière, oui. Pourtant, j’étais ravi d’avoir l’occasion d’échanger quelques mots avec lui. Je l’aime bien ce bonhomme. Peut-être trop.

Beau lisait. Si ça continuait, il allait dévorer tous les livres présents dans cette bibliothèque. Enfin, fallait bien que cette pièce serve à quelque chose et force est de constater qu’il devait être le seul à savoir lire et donc à utiliser comme il se devait cette pièce. Parce que sinon, c’était certain qu’on pouvait trouver Lizzie en train de se goinfrer en cachette, ou bien Cassiopée en train de se morfondre parce qu’elle n’avait pas un 95C aussi parfait qu’une autre, ou encore Orlando en train de se coiffer comme un plumeau. Nan, vraiment, Beau faisait honneur à cette salle. Bref. Alors que le jeune homme tournait sa page, la porte s’ouvrit. Haussant un sourcil, levant les yeux de son bouquin, il attendit de voir de qui il s’agissait. Soulagement lorsqu’il vit la belle blonde. Ocyllie. Décidément la seule qu’il supportait encore. Les autres ? Qu’ils aillent se faire foutre. Ah ouais, pardon, c’est pas comme ça qu’il allait gagner, recommençons. Les autres ? Qu’ils aillent se faire foutre. Passons. La demoiselle lui dit que depuis le temps, elle se demandait s’il était toujours en vie. « Malgré quelques plumes en moins, je suis toujours là. » Après tout, avec toutes ses nominations, il allait bien finir par y laisser plus que des plumes. Tant pis. D’un signe de main et d’un regard, il lui montra le fauteuil, après tout, elle n’allait pas s’enfuir aussi vite, hein. « Pourquoi tu dors pas ? » Demanda-t-il, ‘un ton protecteur, qui ne se le voulait pas du tout.

‘Malgré quelques plumes en moins, je suis toujours là.’ Dit-il. Heureusement. J’aurais mal supporté l’idée de me retrouver seule face ces attardés. Alexis en moins rendait les choses plus compliquées. Au fond, je n’avais plus que lui. Gabriel ne partageait en aucun cas mes sentiments sur les autres habitants, et par moment, je trouvais cela désolant. D’autant plus qu’actuellement, il m’échappe ; c’est le genre de chose qu’on ressent, qu’on subit, mais contre quoi on ne peut rien. J’étais paranoïaque, sans aucun doute, mais j’avais mes raisons de persister à croire qu’une partie de moi ne se trompait pas. Je lui adressais un simple sourire avant de m’approcher, sous son invitation. Je ne m’assis pourtant pas sur un fauteuil ; je préférai gagner ses cuisses. Je prenais son livre d’entre ses doigts, le fermais, le déposais sur la table à côté. Pourquoi je ne dormais pas ? « Pourquoi je dormirais ? » demandai-je doucement. Dormir, une chose plutôt inutile. Si seulement la fatigue n’était pas son accablant complice. Au moins je n’aurais pas à lui dire niaisement que l’absence de Gabriel m’énervait. Puis lui non plus ne dormait pas. « De toute manière je préfère être ici. » annonçai-je, plus amicale. Avec lui ? En effet.

Alors que Beau invitait la sublime blonde à le rejoindre, à s’asseoir à côté de lui, Ocyllie préféra quant à elle se diriger droit sur le candidat, lui retirer son livre et s’installer sur ses genoux. Evidemment, le bellâtre n’émit aucune objection à cela et une main vint même entourer les genoux de la demoiselle, histoire de l’empêcher de glisser. Par la suite, il lui demanda pourquoi ne dormait-elle pas. Elle lui retourna la question, pourquoi dormirait-elle ? Parce que Gabriel était parti dormir ? Haha. Quoique, si Beau s’en souvenait bien, la douce candidate n’avait pas été invité dans la chambre des Waratah. Et pourtant, ce n’était plus les lits qui manquaient. Bref. Non mais Gabriel et Ocyllie ? Qui y croyait ? Pas Beau en tout cas, c’était certain. A part les deux, peut-être les autres candidats, tous aussi idiots les uns que les autres. Mais, non. Ocyllie pensait vraiment que c’était un type aussi gerbant que Gabriel qui lui fallait ? Le bon côté était sans doute que ça ne durerait pas. Sauf s’ils voulaient se faire un peu de fric à la sortie de l’aventure, tout ça. Passons. Beau ne répondit que par un haussement d’épaules avant que son binôme lui révéla qu’elle préférait être ici. Tu m’étonnes. « Alors, reste. » Se contenta-t-il de dire, presque neutre. « Je t’aurais bien proposé un verre, mais je n’en ai pas. » Du regard, il indiqua qu’il parlait de la bouteille d’alcool. Enfin, ils savaient tous les deux qu’elle n’avait pas besoin d’un verre pour boire. Il reprit, doucement, plantant son regard dans le sien. « Qu’est-ce que tu veux ? » De lui. C’était ça la question. Que voulait-elle de lui.

Que je reste. J’y comptais bien. Que faire d’autre ? De toute évidence, rien. Les villas étaient mortes. Autant l’une que l’autre. Quand les habitants n’étaient pas fantomatiques, ils étaient moins actifs que des octogénaires. L’ambiance devenait lourde. Lourde et chiante. Même Francesc se faisait discret. Même si ça, ce n’était pas vraiment déplaisant. Ainsi, je pensais que nous étions les derniers levés ; nous serions les derniers couchés. ‘Je t’aurais bien proposé un verre, mais je n’en ai pas’, me dit-il. J’avouerais que j’aurais bien pris un verre, mais en l’occurrence, il n’en avait pas. Au pire, je n’aurais boire au goulot. Je n’en étais pas à ma première tentative. Une nouvelle fois, je ne lui adressai qu’un bref sourire. Sans plus. Il me demanda alors ce que je voulais. Qu’est-ce que je voulais ? Plein de choses. Trop de choses. Comme toujours. Comme tout le monde. J’aimerais un chiot, par exemple, une nouvelle garde-robe, un collier doré et une bague avec un gros diamant, toutes ces choses de pouffiasses excentriques qui ne rendront pas ma vie plus utile, parler à mon père, pleurer chez ma mère, fumer un bon joint, avoir un avenir. Mais sans grandes convictions, je les espérais. Puis je fis le rapprochement avec Beau. Qu’est-ce que je voulais de lui ? « Je ne sais pas. » Ou je ne sais plus ? « Je ne veux pas que tu partes. Pas comme Alexis. Je ne veux pas me retrouver seule. » lui dis-je, doucement, alors que j’enroulais mon bras derrière sa nuque. Me retrouver seule parmi les fauves ? J’espérais que non. Je ne suis pas de nature pessimiste, pourtant je redoute le moment où cela arriverait. « Et toi, qu’est-ce que tu veux ? » Naturellement, je lui retournais la question, ne serait-ce que pour comprendre où il souhaitait en venir.

Beau avait posé à Ocyllie une question qui, il le savait, n’aurait sans doute pas de réponse. Et effectivement, la réponse ne tarda pas. La « réponse ». Elle ne sait pas. La belle reprit, lui expliquant qu’elle ne souhaitait pas son départ, pas comme Alexis, Ocyllie ne voulait pas non plus se retrouver seule. Beau ne comptait pas partir. Quoique, oui, ça lui avait traversé l’esprit. Mais finalement, il allait finir par se faire dégager assez rapidement alors autant ne pas abandonner, partir par la grande porte, comme on dit. Ocyllie ne voulait pas se retrouver seule. Etrange. Rassurant. Voulait-elle dire que sans Beau, elle serait seule ? Apparemment. Pourtant, elle avait Gabriel, tout de même. L’un des bras de la jolie blonde vint se poser contre la nuque du garçon tandis que les doigts du bel australien venait à caresser le bras de la belle. Par automatisme. Ou pas. Qu’importe. Elle lui retourna finalement la question. Et lui, que voulait-il ? « Toi. » Beau observa encore un peu Ocyllie avant de rompre le contact visuel afin de prendre la bouteille de tequila, qu’il ouvrit d’une main experte avant d’en boire une gorgée. Il manquait le citron et le sel pour que ce soit au top. Reposant la bouteille, Beau se faisait bien silencieux ce soir-là. « Et gagner aussi. Mais pour les deux, ça tient plus du rêve qu’autre chose. » Il accorda ensuite à la sublime blonde un sourire amusé et amical. Après tout, tout cela était réservé à Gabriel. Beau, aurait tout le reste : L’intelligence, la beauté… Bref, ça lui irait très bien aussi.

Il rejoignait mon bras d’une de ses mains, le caressait. Il me répondait. Qu’est-ce qu’il veut ? Moi. Moi ? J’en fus surprise, sans le montrer pour autant. J’aimerais remettre en question son affirmation, pourtant, j’étais trop préoccupée par son regard, son foutu regard. Je cherchais à savoir si il était sincère ou si il se jouait de moi. Pourtant, je persistais à croire –et préférais croire- que oui, il se foutait de moi. Une raison ? Aucune. Peu importe, si il jouait, je rentrerais bêtement dans son jeu. Je n’ajoutai rien. Et alors qu’il quittait mes yeux, je ne me détournais pas de lui ; continuais à l’observer. Il but, puis reposa la bouteille avant qu’il ne reprenne : ‘Et gagner aussi. Mais pour les deux, ça tient plus du rêve qu’autre chose.’ Beau, se morfondre sur son sort ? Impensable. Je lui rendais ce même sourire. Véritablement, cet excès de confidences me laissait perplexe. « Tu dis n’importe quoi. » répondis-je, à mi-voix. Je ne le plaindrais pas. Jamais. Je le respectais trop pour ça. Et malgré l’échec puisant de la semaine dernière, les dés n’étaient pas jetés. Et j’avais la certitude que dans ce jeu, il n’avait pas moins de chance que ces autres crânes de piaf dont l’aventure n’a consisté qu’à gonfler, dormir et se toiletter –et encore, j’ai des doutes. « Mais alors comme ça tu fantasmes sur moi ? » Je cherchais son regard, avec malice, alors qu’un sourire taquin bordait mes lèvres.

Après que Beau ait ingurgité sa dose d’alcool, Ocyllie répondit qu’il disait n’importe quoi. A propos d’elle ou du fait de gagner le jeu ? Les deux ? Allez savoir. Le jeu était sans doute un terrain plus divertissant, si bien que le candidat préféra d’abord évoquer cela. « Non mais je comprends les gens, ça aurait été la première fois qu’une personne intelligente et au charme fou gagne ce genre de jeu. Le changement effraie. » Là, il parlait de lui, hein. Beau avait le don pour se complimenter à chaque fois qu’il ouvrait la bouche, non pas que personne d’autre ne le faisait, simplement, on lui avait toujours apprit qu’il ne fallait pas attendre de voir les gens faire quelque chose lorsque l’on pouvait soi-même le faire. Il mettait en pratique ce fameux conseil. Et puis, seuls les imbéciles ne s’étaient pas encore rendu compte qu’il n’était pas toujours très sérieux dans ses propos. Passons. Maintenant que cela était éclairer, Beau comptait également parler de ce qu’il avait dit plus tôt mais, heureusement sans doute, Ocyllie reprit la parole, évoquant le fait que Beau aurait pu fantasmer sur elle. Une nouvelle fois, leurs regards se croisèrent et Beau gardait ce sourire charmeur, taquin et compagnie. « Jour et nuit. » Amusé, il reprit. « Surtout la nuit, d’ailleurs. » L’australien voulut alors se passer une main derrière la nuque mais à la place, il trouva le bras de la belle. Ah oui. Il reposa alors finalement sa main sur l’une de ses cuisses, elles-même posées sur celle du bellâtre. « Je te retournerais bien la question mais je connais déjà la réponse. » Bien sur qu’elle fantasmait sur lui, comme toutes les autres. Même Lizzie, évidemment, et ça ce n’était pas pour plaire au garçon, plutôt le dégouté d’ailleurs. Bref. Beau ne reposa finalement aucune question. Sans doute avait-il eu toutes les réponses souhaitées. Et puis, observer la douce blonde sans parler, ce n’était pas mal non plus.

Sa réplique me rappelait davantage le Beau que j’avais l’habitude de côtoyer. Intelligent et charmant, se disait-il. Trop de changements pour les téléspectateurs, plus habitués à voir en tête d’affiche les plus niais ; je confirme. Ainsi, il était impossible qu’il gagne. Dommage. Mais personnellement, j’avais la certitude qu’il irait loin ; au minimum je lui donnais encore trois semaines. Me concernant, je n’aimais pas me prononcer. J’aimerais gagner. Evidement. J’espérais au moins atteindre la finale. Pourtant, je me sentais aussi vulnérable qu’un autre ; après tout, je gardais la certitude que la plupart des habitants m’espéraient dehors aussi rapidement qu’il espérait Beau, sans quoi, je n’aurais pas été nominée deux fois déjà. « Je n’ai donc aucunes chances non plus…» lançai-je, faussement hautaine ou déçue ; sans importance, puisque je forçais l’ironie. Belle et intelligente. Je répondais aux critères, non ? Je lui adressais un sourire complice, avant de l’écouter poursuivre, au sujet de son second ‘rêve’. Je lui demandais s’il fantasmait réellement sur moi. Jour et nuit, répondit-il. Evidement, je ne pus qu’en sourire, amusée, à mon tour. D’autant plus quand il poursuivit ‘surtout la nuit’. Sa main gagna ma cuisse alors qu’il reprit. ‘Je te retournerais bien la question mais je connais déjà la réponse.’ En se basant sur l’expression de son visage, ma réponse ne pouvait qu’être positive. En gros, oui, je fantasmais sur le jeune homme. « Evidement que je fantasme sur toi. Mais uniquement en secret. » lui murmurai-je doucement à l’oreille, sous un imperceptible sourire en coin. Un bref silence s’installait. Il m’observait. Je n’en faisais pas moins à son égard. « Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? » lui demandai-je. Je brisais le silence. Pour quoi ? Justement l’inspiration me manquait. Qu'il donne ses directives.

La personne qui allait gagner l’aventure serait très certainement idiot et au charme plus que douteux. D’après les dires de Beau – et nous savons qu’il a toujours raison. C’est pourquoi, Ocyllie lui dit qu’elle n’avait aucune chance non plus. Belle et intelligente. Beau plissa les yeux un instant, signe qu’il réfléchissait. « Si, t’as une chance. » Amusé, il n’en dit pas plus avant de finalement répondre à la jeune femme concernant le fait qu’il fantasmerait sur elle et de justement, ne pas lui retourner la question. La belle blonde y répondit tout de même. Elle fantasmait sur, en secret. Bien sur, elle n’était pas sérieuse – heureusement ? Toujours est-il que ce bellâtre d’australien lui accorda un clin d’œil entendu. « Je ne dirais rien, alors. » Les deux jeunes gens s’observèrent alors, jusqu’à ce que finalement, la candidate rompe ce silence. Que faisaient-ils à présent ? Beau n’en avait aucune idée. Il n’était jamais du genre à lancer une idée faramineuse lorsqu’il s’agissait de surprendre un groupe d’amis – parce que oui, Beau avait des amis, des tas même. L’homme soupira alors. « Tu n’as qu’à parler. » Il esquissa un sourire. « C’est bien ce que vous faites toutes, non ? Toujours parler, encore et encore. Je n’aurais qu’à finir la tequila en faisant semblant de t’écouter. » Ouais, il était bien en train de dire que les filles n’arrêtaient pas de jacasser pour un rien et que donc, Ocyllie devait être en manque. D’ailleurs, Beau aussi était en manque. Mais lui c’était le genre de manque qu’il ne pourrait pas assouvir. Sauf si Ocyllie se mettait nue, maintenant. C’est con, mais il espérait presque vexer Ocyllie en la comparant à toutes les autres. « Et après tu n’auras qu’à abuser de moi. » Parce qu’il sera saoul, vous suivez ? Non ? Lui aussi, commençait à s’y perdre. Quelle importance.