AVEC CASSIOPEE, le vingt-et-un mai à dix-sept heures

Je n'arrivais toujours pas à croire que j'étais encore là pour la troisième semaine de l'aventure, et que ne pouvant être nominé cette semaine cela signifiait également que je serai présent la semaine prochaine. Mais pour moi si j'étais encore là c'était simplement parce que les autres n'avaient pas eu l'occasion de me nominer et que s'ils en avaient eu la possibilité je serais parti depuis longtemps. Mais c'était une bonne chose, même si je ne semblais pas faire de progrès au niveau de ma timidité, j'espérais que cela s'améliorerait dans les semaines à venir. C'était essentiellement pour cette raison que j'étais venu, pour essayer de me dépasser. Pour le moment cela n'avait pas très bien marché mais je ne désespérais pas. Pour l'heure, loin de moi l'idée d'aller parler à un candidat de moi-même. Je préfère toujours que les autres fassent le premier pas vers moi, et je n'avais donc pour le moment personne à qui parler (je n'étais pas très bavard non plus il fallait le dire). J'avais envie de profiter du soleil, moi qui ne sortait jamais de chez moi, ou seulement pour aller travailler. J'avais d'abord pris soin de mettre de la crème solaire et je m'étais alors installé sur une des chaises longues de la terrasse.

Cassiopée n'était pas du genre à se lever tôt pour se coucher comme les poules. Elle vivait la nuit, comme un vampire. Hors de question pour elle de ne pas profiter de ces quelques semaines de vacances. Oui, elle prenait son aventure comme des vacances. Depuis qu'elle était gamine elle devait se lever tous les matins pour se rendre en cours ou encore pour vaquer à des occupations plus ou moins gonflantes à la longue, alors elle n'allait pas se prendre la tête ici. Elle déambulait dans les couloirs de la villa, sourire aux lèvres, adressant un signe de la tête à l'un, faisant la bise à un autre. L'extérieur. Le jardin. L'air frais. Il n'y avait rien de mieux pour s’oxygéner la tête un instant. Elle regardait l'horizon jusqu'à apercevoir un candidat tout seul dans son coin. Le petit Lewis. Elle ne savait pas vraiment pourquoi, mais ce mec l'intriguait. L'occasion de le découvrir un petit peu plus s'offrait à elle et la demoiselle ne comptait pas laisser passer cette chance. D'une démarche plutôt assurée, la gamine s'approchait de lui. « Bonjour » lâchait-elle d'une petite voix douce. Il semblait timide et elle ne voulait pas lui faire peur ou le mettre mal à l'aise. « Je peux ? » demandait la jeune femme en désignant le bain de soleil libre qui se trouvait juste à côté de lui. Un sourire naissait sur les lèvres de la demoiselle aux yeux clairs.

La solitude ne me dérangeait pas, rester ici allongé des heures avec comme seul passe-temps de me remettre de la crème solaire environ toutes les heures ne me posait aucun problème. J'avais toujours su tirer profit de la solitude, et même si j'étais seul je ne ressentais pas le besoin d'être entouré. Sauf récemment, et c'était pourquoi j'étais venu ici pour essayer de vaincre ma timidité, pas nécessairement pour faire des rencontres qui me suivront après le jeu. Je ne l'espérais pas trop parce que je savais que si je le faisais je serais déçu au final. Et je ne voulais pas de cette déception vaine. Alors je me contentais de penser que je ferais peut-être quelques rencontres ici, si jamais j'arrivais à dépasser ma timidité mais que cela n'irait pas plus loin. C'est pourquoi tandis que les autres devaient certainement être en train de s'amuser tous ensemble, j'étais seul assis sur une chaise longue à ne rien faire. Et cela ne me posait évidemment aucun problème. J'entendis alors une voix me saluer, j'ouvris les yeux doucement pour voir à qui appartenait cette voix. C'était celle de Cassiopée, enfin si je ne me trompais pas sur son prénom. « Bonjour. » lui répondis-je d'une voix basse comme si j'avais peur de dire quelque chose qui ne fallait pas. « Oh oui bien sûr.» Je n'allais pas l'empêcher de s'asseoir tout de même, et cela ne me dérangeait pas vraiment non plus. Je pouvais sentir mes joues s'empourprer légèrement à mesure que je lui avais parlé, réaction tout à fait normal chez moi.

Oui, Lewis attirait l'attention de la brunette qui répondait au doux prénom de Cassiopée. Pourquoi ? Très certainement car il ne se mélangeait pas vraiment aux autres candidats et qu'on le voyait peu. Pourtant, ce n'était pas comme si Cleveland avait déjà eu l'occasion de se prendre pour un lion et de dévorer tout cru l'un des candidats. Il était seul et c'était l'occasion idéale pour faire sa connaissance, pour essayer de l'aider à trouver sa place au sein de la villa. La belle venait de s'approchait sans faire trop de bruit. Elle ne voulait pas qu'il prenne la fuite dès qu'il la verrait. C'était d'une voix douce qu'elle l'abordait. Sans trop le brusquer, elle le saluait avant de lui demander si elle pouvait occuper le bain de soleil qui se trouvait juste à ses côtés. Il lui répondait qu'elle le pouvait s'il elle le voulait, ce qu'elle faisait sans se faire prier. Cassiopée avait remarqué que les joues du garçon avaient virées au rouge au fur et à mesure qu'il avait parlé. C'était carrément attendrissant et ça faisait même sourire la jeune femme. Lewis, c'était un peu le nounours de la bande. Il semblait tellement gentil qu'à chaque fois qu'on le voyait on n'avait qu'une envie celle de lui faire un gros câlin. Enfin, ce n'était pas en s'installant à côté de lui que Cassiopée allait l'aider à vaincre sa timidité. Instinctivement, elle tournait la tête dans sa direction pour l'observer une très courte seconde avant d'apercevoir un tube de crème solaire sur le sol juste à côté de lui. Bingo. « Je peux t’emprunter un peu de crème s'il te plait ? » demandait-elle d'une voix toujours aussi douce que précédemment. « J'ai oublié la mienne à l'intérieur et je risque de ressembler à une tomate trop mûre d'ici quelques minutes si je m'expose un peu trop au soleil. » Pas besoin de te justifier Cassiopée, on avait tous très bien comprit.

J'étais clairement mal à l'aise lorsqu'il s'agissait de parler avec quelqu'un d'autre et immédiatement mes joues viraient au rouge lorsque cela se produisait même lors d'une simple conversation, mais j'essayais vraiment de faire des efforts. Je voulais me socialiser un minimum et apprendre à sortir de ma carapace, c'était sans doute trop demander en faisant une aventure de télé-réalité mais j'imaginais que cela pourrait m'aider ne serait-ce qu'un peu. Enfin j'aurai l'occasion de vérifier cela dans les semaines à venir. Pour le moment il me fallait essayer de tenir une conversation avec la jeune femme en face de moi, Cassiopée si je ne me trompais. Elle parlait doucement sûrement pour ne pas me faire fuir. J'étais reconnaissant quand les gens faisaient des efforts avec moi, et qu'ils savaient se montrer compréhensible. « Oui bien sûr, vas-y.» J'essayais rapidement de lui sourire, bien que je n'y parvienne sûrement pas à cause de ma timidité maladive, et je lui passais le tube de crème solaire que j'avais mis par terre quelques minutes auparavant. Oui je n'étais pas très loquace, et à cet instant je ne savais pas quoi lui dire.

D'un naturel généreux, Cassiopée était presque une professionnelle lorsqu'il fallait aider les autres, mais là c'était diffèrent. La brunette passait autant de temps qu'elle le pouvait à aider les habitants des pays pauvres pour qu'ils puissent manger, boire, se soigner et que les enfants apprennent à lire et à écrire, mais elle n'avait encore jamais eu l'occasion d'aider quelqu'un à vaincre une timidité maladive. Elle ne savait pas vraiment comment s'y prendre. Elle ne voulait pas le brusquer. C'était avec une grande délicatesse qu'elle attrapait le tube de crème solaire du bout des doigts. Elle s'offrait même le luxe de lui adresser un petit sourire, comme pour le mettre en confiance. Il n'était pas bavard, mais c'était plutôt logique. La jeune femme se redressait légèrement tout en ouvrant le tube pour mettre une noisette de crème dans sa main. « Lewis ? C'est ça ? » demandait-elle toujours aussi douce et souriante qu'au début. Elle jetait un bref coup d'oeil dans sa direction tout en étalant la crème sur les endroit accessible de son corps, autrement dit ses bras, le haut de ses épaules, son ventre ainsi que ses jambes. « Merci. » Elle lui rendait son bien avant de s'allonger sur le bain de soleil. Peut-être que s'il ne croisait pas le regard de la jeune femme, il se montrerait un tout petit peu plus bavard.

De toute manière il est évident que je ne suis pas pas très bavard, parler ce n'est pas mon fort. Je ne fais pas partie de ces timides qui sont frustrés de ne pas pouvoir s'exprimer comme ils le voudraient, non la seule chose qui me manque dans ma vie c'est des relations. C'est la raison pour laquelle je suis venu ici, pour m'ouvrir d'avantage pour essayer de vaincre ma timidité et d'apprendre à avoir une conversation avec des mots de plus de trois syllabes. C'était véritablement un défi pour moi, et jusqu'à présent je n'avais pas réussi à le relever. Je faisais des efforts mais comme à ce moment précis, je ne savais pas quoi dire, pas quoi faire pour relancer la conversation et essayer de me montrer plus sociable, et surtout je ne savais pas si j'en étais capable. Je lui avais déjà répondu, et je ne m'étais pas terrer dans mon silence, comme j'aurais pu avoir l'habitude de le faire, c'était déjà un bon début. « Exactement. Et toi Cassiopée ? » Voilà c'était à peu près tout ce que j'étais capable de lui dire à ce moment précis, et rien d'autre ne voulait et surtout n'osait sortir de ma bouche. C'était malheureux mais c'était comme ça.

« C'est ça. » disait-elle alors qu'un sourire amical venait s'emparer de ses lèvres et que sa tête se tournait pour que son regard se pose sur le garçon. Cassiopée ne savait plus par où continuer. Elle était un petit peu perdue. Lewis n'était pas bavard et il arrivait à transmettre sa timidité aux autres. Surprenant. La brunette se laissait cuire au soleil quelques minutes. Elle cherchait comment engager une véritable conversation. « Parle moi un peu de toi. J'ai envie de savoir ce que tu fais dans la vie, où tu habites et ce que tu aimes faire de ton temps libre. » Elle semblait toujours aussi douce pour ne pas le brusquer. Heureusement qu'elle avait de la patience.